LE MOT DU COMMISSAIRE D'EXPOSITION
Né dans le Bronx délabré et apocalyptique des années 70 en tant que nouveau mode d'expression des jeunesses principalement afro-américaine et porto-ricaine, la culture Hip-Hop a su s'imposer comme un des courants artistiques et culturels prédominants de ces 50 dernières années. Depuis, elle s'est répandue sur la planète entière et, à ce jour, nous pouvons lui attribuer une bonne quarantaine d'années de présence en France.
Avec son identité construite autour de ses différentes disciplines (musique, danse, graffiti,...), ce mouvement a tout bouleversé dans notre manière de concevoir la production musicale, la danse ou l'art pictural. Le Hip-hop s'est également accompagné dès les premières heures d'une philosophie de l'émancipation tant par la réflexion que dans l'action si bien que le terme « activiste » n'aura jamais été autant utilisé que pour caractériser les acteurs de cette culture.
En 2024, la musique, la mode, l'image,... nous prouvent que les codes esthétiques du Hip-Hop sont omniprésents et ont largement influencé le développement et les mutations de ces champs artistiques si bien que l'on peut se demander si cette culture née en opposition à certains codes dominants ne s'est pas finalement transformée en « culture intégrée ».
J'ai rencontré Alain Garnier aux premières secondes des années 80. En ces temps reculés, nous étions tous deux immergés dans la culture « Rock'n'Roll », une ère préhistorique où il n'y avait pas encore de Hip-Hop en France. C'est également à cette époque qu'Alain effectuait ses premiers pas photographiques. Nous ne nous sommes jamais perdus de vue depuis.
C'est donc finalement assez logiquement que nous nous sommes retrouvés en 1989 dans l'aventure autour de la compilation RAPATTITUDE et que j'ai suivi son travail sur la scène musicale Hip-Hop française au cours des années 90.
Je qualifierai Alain de « photographe de terrain », une sorte de « photographe de guerre de la culture », perpétuellement habité par l'obsession de la quête du regard le plus authentique possible. Au contraire de bon nombre de ses pairs, il a très peu publié de photos dans les magazines « officiels » en privilégiant l'exclusivité de son œuvre en direction des fanzines de passionnés, préférant l'activisme « underground » à la soumission au diktat capitalistique de l'industrie phonographique.
Après plus de 30 ans, son travail sur la scène Hip-Hop prend aujourd'hui tout son sens, d'une part par le témoignage qu'il constitue mais également par sa dimension patrimoniale.